Perros-Guirec, le 15 novembre 2016
Fédération Nationale des Pêcheurs Plaisanciers et Sportifs de France
Objet : Lettre ouverte à M. Alain Vidalies, Secrétaire d’Etat à la Mer
Monsieur le Secrétaire d’Etat à la Mer,
Les fédérations françaises concernées par la pêche maritime ont contresigné avec deux ministres en 2010 une Charte d’engagement pour une pêche de loisir écoresponsable.
Les travaux qui s’en sont suivis ont permis de mettre en place plusieurs mesures : lutte contre le braconnage et taille biologique de 42 cm appliquée hélas aux seuls pêcheurs de loisir ! D’autres mesures devaient suivre mais n’ont pas pu être mises en œuvre suite à la mise en sommeil du CSNPSN par les services de l’Etat : déclaration des pêcheurs de loisir sur Internet, relevé des prises sur la base du volontariat, repos biologique…
Ces mesures appliquées aux seuls plaisanciers, n’ont malheureusement pas permis d’enrayer la diminution de la ressource, la plus grande partie du prélèvement étant réalisée par la pêche professionnelle et notamment par les pélagiques pendant la période de fraie.
Cela a conduit la Commission Européenne à proposer des mesures d’urgence au cours de l’année 2015 : protection des frayères, établissement d’une taille minimale de capture de 42 cm pour tous, limitation des débarquements mensuels des pêcheurs professionnels et quota journalier de 3 bars par jour et par pêcheur pour les pêcheurs récréatifs.
Ces mesures ne concernant malheureusement que les zones pointe de Bretagne, Manche et Mer du Nord (Nord du 48ème parallèle), ont provoqué d’inévitables reports de pêche sur les zones Atlantique et Golfe de Gascogne (Sud du 48ème parallèle).
En 2016, s’appuyant sur les données scientifiques en sa possession, la Commission Européenne a encore réduit les possibilités de pêche au nord du 48ème parallèle. Pour les professionnels, la pêche a été interdite de janvier à juin pour le chalut et de février à mars pour les ligneurs et fileyeurs. Pour la pêche plaisance, la pêche a été interdite de janvier à juin et le quota journalier réduit à 1 bar par jour et par pêcheur au deuxième semestre.
Ces mesures européennes s’ajoutant aux mesures nationales ont été perçues par les pêcheurs plaisanciers comme une double peine. Beaucoup d’entre eux ont choisi de ne plus pratiquer une activité de loisir aujourd’hui asphyxiée par les taxes et les interdictions. Les conséquences sur les filières halieutique et nautique sont aujourd’hui très palpables : diminution des listes d’attente dans les ports, augmentation du nombre de bateaux d’occasion à la vente, diminution sensible du chiffre d’affaire chez les détaillants en articles de pêche et dans les chantiers navals conduisant parfois à leur fermeture… Un même constat a été fait dans les autres pays européens concernés.
Les pêcheurs de loisir européens regroupés au sein de l’EAA (European Anglers Alliance) sont donc intervenus auprès de la commission pour faire part des conséquences désastreuses des mesures actuellement en vigueur, des mesures jugées injustes, incohérentes et inefficaces. Ils ont proposé la mise en place d’un quota mensuel plus adapté à leurs pratiques et seul capable de maintenir un niveau satisfaisant pour une activité dont le poids économique est considérable. Cela nécessitera, bien sûr, une déclaration obligatoire avant débarquement des prises réalisées comme cela se fait déjà pour d’autres espèces : thon rouge, anguille voire bécasse, lièvre et bien d’autres espèces pour les chasseurs…
La FNPPSF comme d’autres fédérations concernées ont démontré
que le suivi des prélèvements peut se faire avec la plus grande rigueur. Cette approche permettra aussi, comme le souhaitent les scientifiques, de connaître plus précisément le niveau de prélèvement de la pêche de loisir et de gérer ses prélèvements dans le strict respect des quotas globaux alloués. Dans cet esprit, la FNPPSF s’est portée candidate à une expérimentation pilote du quota mensuel sur le bar dès 2017. La mise en place du suivi individualisé des prélèvements pourrait se faire dès le mois d’avril soit à la fin de la période de fermeture pour repos biologique.
Pour des raisons évidentes de cohérence et éviter la surpêche inévitable dans les zones non concernées, les pêcheurs de loisir européens souhaitent aussi que les mesures 2017 qui seront décidées en décembre soient applicables dans toutes les zones y compris l’Atlantique et le Golfe de Gascogne.
A la lecture des propositions émanant de la Commission européenne, nous constatons avec satisfaction que la pêche de loisir a été enfin prise en compte par les instances européennes.
La FNPPSF avec le concours de l’EAA et de l’EFTTA a su mettre en
évidence le poids économique et sociologique considérable engendré par la pêche en mer de loisir en Europe comme en France (voir les vidéos à ce sujet sur notre site fnppsf.fr). Nous avons aussi pu montrer que notre activité s’inscrivait parfaitement dans une logique de pêche durable. Nous remercions les membres de la commission pêche européenne pour leur objectivité et l’écoute qu’ils nous ont manifestées.
Sur la base du poids économique et sociologique, les pêcheries aux prélèvements limités utilisant des hameçons et des lignes devraient donc être autorisées. Une période de repos biologique devrait être instaurée en février et mars (No Kill uniquement). Pour les autres mois, le prélèvement de la pêche de loisir serait limité à 10 bars par mois et par pêcheur.
Ces propositions de mesures doivent bien sûr être confirmées par le Conseil des Ministres de la Pêche Européen qui se tiendra en décembre. Nous vous demandons donc, Monsieur le Secrétaire d’Etat à la Mer, de soutenir avec la plus grande détermination les mesures proposées par la commission européenne pour la pêche de
loisir, une activité aujourd’hui en péril, et qui, rappelons le, s’inscrit parfaitement dans une logique de pêche durable et éco-responsable et génère un poids économique et sociologique considérable souligné avec insistance par le Président de la République lors des Assises de l’Economie de la Mer à La Rochelle.
Nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Secrétaire d’Etat, l’expression de notre très haute considération.
Jean Kiffer, Président de la FNPPSF et le Comité Directeur de la FNPPSF